L’addiction est « une affection cérébrale chronique, récidivante, caractérisée par la recherche et l’usage compulsif de drogue, malgré la connaissance de ses conséquences nocives.« [1]
Accompagnement nutritionnel au sevrage tabagique :
La période du sevrage est une période à risque pour la prise du poids et le développement de la restriction cognitive. En effet, la nicotine agit sur les circuits de régulation de l’appétit en stimulant des neurones anorexigènes (qui diminuent l’appétit) et en perturbant les signaux régulateurs (notamment la leptine) dans le tube digestif en envoyant des signaux précoces de satiété. Egalement, le fait de fumer augmente la consommation énergétique de 100 à 200 kcal/jour.
Une personne qui arrête de fumer va retrouver son métabolisme normal (celui sans les effets de la nicotine) : il est donc normal de retrouver son poids d’équilibre sans perturbateur, c’est-à-dire avec une augmentation de quelques kilos.
Attention cependant, cela concerne une prise entre 2 à 5 kg selon les personnes. Le risque de prise de poids plus importante est sensible à cette période car le sevrage est un processus long et psychologiquement impactant : il faut renoncer à un produit, ainsi qu’à des plaisirs et des habitudes qui allaient avec. Dans la plupart des cas, la cigarette est une compagne de longue date, c’est pourquoi en faire le deuil prend du temps et la tentation de trouver du plaisir ailleurs va être recherchée pour compenser cette perte.
Les facteurs de risque à une forte prise de poids :
- Le retour du goût et de l’odorat très rapidement après l’arrêt vont être source de plaisir gustatif ce qui est très positif pour le moral, mais peut conduire à une consommation élevée de nourriture (notamment sucrée) ;
- Une période de stress qui peut conduire à des comportements émotifs (de réconfort) avec la nourriture ;
- Des périodes d’ennui, de compensation « du manque du geste de fumer » (il n’est pas rare de fumer lorsque l’on s’ennuie) : la prise alimentaire peut facilement occuper cette place « vide » (manger pour tromper l’ennui) ;
- Une déconnexion avec les sensations alimentaires, notamment de rassasiement, installée avec l’habitude de terminer un repas par une cigarette. Sans cette dernière cigarette devenue un repère pour terminer le repas, le signal de rassasiement n’est pas détecté et la prise alimentaire peut être majorée.
Dans tous les cas, l’arrêt de la cigarette est toujours bénéfique. Le sevrage tabagique doit s’accompagner d’un suivi nutritionnel pour mettre en place rapidement les bonnes habitudes et retrouver ses sensations alimentaires guidées par la faim et la satiété : l’alimentation et la peur de prendre du poids ne doivent pas être un frein à l’arrêt du tabac.
Alcool, psychotropes et nutrition
La consommation d’alcool et/ou de psychotropes ont des retentissements nutritionnels importants variant selon le produits, les quantités, le mode de consommation et la durée et les facteurs personnels. L’éventail des troubles est important et varié, voici les plus fréquents :
- Troubles digestifs (diarrhées, douleurs abdominales, nausées, constipations, etc.) qui peuvent conduire les consommateurs à faire des évictions alimentaires plus ou moins sévères pour éviter les troubles gastriques ;
- Perte d’appétit ou d’intérêt pour la nourriture, anorexie ;
- Dénutrition (qui est une maladie grave évolutive) ;
- Alimentation déséquilibrée : appétence pour le sucre et/ou le gras, pauvre en fruits et légumes, en oléagineux et en produits céréaliers impliquant des déficits en vitamines (pouvant provoquer des pathologies importantes comme par exemple le syndrome de Korsakoff par un déficit en vitamine B1 chez les personnes alcoolodépendantes) ;
- Prise de poids, hypertriglycémie, diabète de type 2 ;
- Augmente le risque de pathologie : troubles cardio-vasculaires, cancers des voies aériennes, digestive, urinaire, etc qui induisent un état d’inflammation et augmente le risque de dénutrition ;
- Technique de consommation : par IV ou inhalation : effet direct sur le système nerveux central qui peut provoquer malabsorption des nutriments.
Mon rôle est ici de vous accompagner dans le maintien d’une alimentation équilibrée selon vos besoins afin de ne pas perturber davantage votre organisme et d’éviter le développement de pathologies dont une mauvaise alimentation serait responsable, mais également de repérer une situation de dénutrition qui est une maladie grave et évolutive.
Accompagnement nutritionnel en période de sevrage et maintien de l’abstinence :
Le sevrage est une période sensible où il faut se recréer un monde sans produit avec de forts impacts au niveau métabolique mais aussi psychologique. La nutrition a un intérêt dans la prévention de la rechute à plusieurs niveaux dont l’amélioration de l’humeur et la réduction des craving (désir irrépressible de consommer une substance).
Lors d’un sevrage, il n’est pas rare de voir apparaitre certains symptômes dits PAWS (post acute withdrawl syndrome) qui peuvent durer d’ un à deux ans après le début du sevrage : agressivité, colère, dépression, changement d’humeur, insomnie, fatigue, anhédonie, trouble de la mémoire, sensibilité au stress, etc.
Dans un premier temps l’équilibre alimentaire aura pour but de ramener à un poids stable et d’apporter les nutriments nécessaires au bon fonctionnement de l’organisme, mais également de soulager les troubles digestifs.
Puis dans un second temps, une alimentation équilibrée en macro et micro-nutriments apportera des neurotransmetteurs régulateurs d’humeur comme la sérotonine (dont le précurseur est le tryptophane présent dans les œufs, produits laitiers et céréales complètes), le GABA (régulateur de l’activité cérébrale, co facteur B6), la dopamine (hormone du système de récompense, précurseur phénylalanine présente dans germe de blé, viande, fromage, œufs, chocolat, etc). Ces neurotransmetteurs n’ont pas réellement d’impact en début de sevrage, mais leur intérêt devient important pour le maintien de l’abstinence.
L’alimentation est une réelle alliée dans cette période difficile qu’est celle de l’abstinence. Elle permet à l’organisme de retrouver un équilibre métabolique nécessaire à son bon fonctionnement, et elle peut être source de plaisir gustatif et neuronal (certains aliments activent le système de récompense au niveau cérébral, à l’instar de la prise de stupéfiants et peut ainsi limiter les envie de consommer).
Attention cependant : certaines personnes peuvent prendre du poids après le sevrage car leur comportement addictif pourra être compensé dans la nourriture. Il faudra être vigilant à ce que l’addiction ne se déplace pas dans une prise alimentaire excessive à long terme (via l’activation du système de récompense, le plus souvent stimulé par les aliments hypercaloriques (gras et/ou sucrés))
A contrario, après un sevrage alcoolique, il n’est pas rare de perdre du poids et certaines personnes sont tentées de se mettre en régime restrictif pour accélérer (voire forcer) la perte de poids. Ce genre de régime est délétère pour le bon fonctionnement métabolique car souvent pas assez énergétique (trop faible en calories) et éprouve l’esprit qui doit ignorer les signaux de faim envoyés par le cerveau. Le sevrage d’un produit a déjà une place bien présente dans l’esprit et souvent éprouvante, il n’est pas judicieux de rajouter une autre source de frustration via l’alimentation.
[1] National Institute of Drug abuse (NINA)
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